Relier Ouchy

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Se rendre d’Ouchy au centre de Lausanne, c'est marcher un bon kilomètre et demi et affronter une dénivellation de 125 mètres. Pas facile pour les individus ni pour les marchandises transportées à dos d’âne ou par chars. Juste après la construction de la gare ferroviaire, plusieurs projets imaginent une liaison ferrée entre le port et la gare mais sans suite. En 1868, Jean-Jacques Mercier-Marcel, directeur de la tannerie industrielle installée dans la vallée du Flon, associé à l’ingénieur cantonal Louis Gonin veulent financer cette liaison rendue nécessaire par le développement du tourisme lacustre et les échanges marchands.

En 1871, ils obtiennent le feu vert du Grand conseil pour exploiter un chemin de fer à propulsion pneumatique. L’utilisation conjointe des eaux du lac de Bret alimentant les machines à vapeur devant fournir l’air comprimé pour la traction des wagons, est également autorisée. Les difficultés techniques obligent cependant de revoir le projet.

En 1873, la traction à air comprimé se voit réservée à la jonction gare-Flon, tandis que la liaison gare-Ouchy suppose la construction d’un funiculaire à câble d’acier, le système par crémaillère n’étant pas encore bien diffusé. Le financement est garanti par des banquiers bâlois à la fin de l'année.


La Compagnie du Lausanne-Ouchy et des eaux de Bret

Fondée le 24 juillet 1873, la Compagnie présidée par Jean-Jacques Mercier-Marcel est constituée le 12 mars 1874. Elle est dotée d’un capital actions de 2,6 millions de francs complété par un montant équivlent en obligations. L’Etat de Vaud promet de souscrire pour 1 million de francs en  actions dès que la ligne sera ouverte entre Ouchy et la gare. La direction de la société est confiée à l’ingénieur J.J. Lochmann.

Amener l’eau depuis le lac de Bret

En vue de l’installation d’une station au Flon avec gare des marchandises, d’importants travaux de génie civil sont nécessaires et débutent en 1874, avec deux tunnels au programme: l'un à Montbenon, l'autre sous la gare ferroviaire.

L’eau étant la première source d’énergie, on ne peut compter sur le débit du Flon et encore moins sur les sources d'eau potable pour alimenter les machines censées permettre non seulement la traction des wagons mais aussi le fonctionnement des transbordeurs, treuils, monte-charge et autres machines-outils des ateliers.

On construit donc un aqueduc depuis le lac de Bret, au nord de Puidoux, soit à quelque 15 km de la ville. Ce lac n’étant alimenté que par l’eau de pluie, il faut détourner la rivière Grenet et aménager le terrain au prix de 287 expropriations et en résolvant de nombreuses difficultés techniques qui se répercutent sur le coût global de l’opération: entre le début et la fin des travaux, l’investissement est multiplié par deux. Le financement est assuré par les entrepreneurs qui comptent tirer profit de cette force hydraulique pour leurs propres sociétés (imprimeries, serrureries, charpenteries, blanchisseries, etc.). L’eau de Bret arrive par Chailly le 30 décembre 1875 et circule dès lors dans un réseau qui atteint quelque 47 km de long une fois étendu aux communes suburbaines et même Morges en 1881.

Cet apport d’énergie sert directement la croissance économique de la cité et assure le développement précoce de l’électricité à Lausanne. Une première centrale est construite en 1882 par la Société vaudoise d’électricité de Léon Raoux. La même année, symbole de ce dynamisme industriel, la gare du Flon, voisine de la centrale, est le premier bâtiment bénéficiant de l’électricité.

La compagnie commence à distribuer l’électricité notamment pour l’éclairage public, avant que la Municipalité ne s'affranchisse des sociétés privées via l’usine de Pierre de Plan en 1902. L’activité d’électricien de la compagnie du Lausanne-Ouchy s'achève en 1913, date à laquelle les services industriels de Lausanne reprennent ses abonnés.